Les Forges & Chantiers de la Méditerranée de 1853 à 1942
du n° 1 au n° 1247, du Languedoc au Kairouan…
(61 sujets traités, 42 diaporamas)
Résumé
« Un premier chantier de constructions de bateaux à voile et à rames destinés aux pêcheurs et à la marine royale existe à partir de 1711 sur le côté Est du port de La Seyne. Par la suite, d’autres petits chantiers du même type émergent.
(voir : laseyneen1900.fr/2022/11/07/abran-les-premiers-chantiers-maritimes-de-la-ville*/)
Les activités de construction navale sont attestées dès le 17e siècle sur le littoral de La Seyne. Un chantier de construction navale est créé en 1711 par Pierre Tortel à l’est du port de la Seyne. On y construit des bateaux à voiles et à rames pour la Marine royale mais aussi pour les pêcheurs de la Seyne. Les chantiers de ce type se multiplient à proximité du port au 18e siècle. En 1818, Edward Church s’associe au constructeur Seynois Lombard, qui dispose d’un chantier au lieu dit les Espageols, pour créer un chantier au quartier de la Lune.
A partir de 1835, deux entrepreneurs marseillais, Mathieu, puis Lombard, prennent en main la destinée des chantiers navals seynois en les transformant en véritable entreprise industrielle*, assistés d’un ingénieur seynois M. Verlaque et de deux ingénieurs britanniques, les frères Evans. Le rivage est comblé du côté est sur 2500 m².
*par le nombre de leurs employés et leur vaste implantation sur le quartier de La Lune.
En 1839, M. Lombard prend une décision capitale, celle de se convertir progressivement à la construction métallique*.
*A côté de l’activité de menuiserie toujours importante, de nouveaux métiers du métal se créent dans ces chantiers « modernes »: tôliers, chaudronniers, riveurs. La construction navale reçoit encore à l’époque ses chaudières, ses moteurs d’autres entreprises.
*Avec Philip Taylor, les chantiers navals seynois prennent un essor décisif malgré la crise de 1848. En 1835, avec l’aide financière de son frère industriel, et d’un minotier marseillais, l’ingénieur fonde un atelier de mécanique à Menpenti à Marseille, qui fabrique les machines à vapeur et des moteurs de bateaux.
Entre 1842 et 1845, deux cales sont construites, l’une de 70 m et l’autre de 150 m de long. Les chantiers de la Lune sont agrandis et leur surface est portée à 4 ha en 1849.
En 1845, Philip Taylor, l’ingénieur anglais qui avait fondé un atelier de mécanique à Menpenti à Marseille, rachète les Chantiers navals de La Seyne et se lance dans la construction navale de grande ampleur.* *comblements et grands travaux augmentaient la surface du Chantier par milliers de m2.
Le Languedoc
En 1853, il fonde les Forges et Chantiers de la Méditerranée, entreprise de construction navale intégrée, en regroupant les « Forges de la Capelette » (Marseille), qui produisent les tôles et les tubes, les ateliers Menpenti, qui construisent les chaudières et les appareils moteurs, et les Chantiers de La Seyne qui assemblent les navires.
Le contexte historique et économique soutient la croissance des Chantiers qui passent de 200 à 1300 salariés jusqu’à la crise de 1848 : développement de la batellerie fluviale ou du cabotage à vapeur pour accroître les transports intérieurs, développement du commerce méditerranéen, industrialisation du Nord de l’Italie, conquête de l’Algérie et entrée dans une nouvelle ère d’explorations puis de colonisations.
« Le 1er mars 1855, l’assemblée générale de la Compagnie des Forges et Chantiers de la Méditerranée prend la décision de liquider la société après seulement deux années d’existence pendant lesquelles 16 navires ont été construits représentant 14.435 tonnes de déplacement et 2.075 chevaux vapeur.
La décision de liquider la société, et, surtout, d’en réorganiser une nouvelle avec une entreprise aussi puissante financièrement que les Messageries Impériales, a dû rassurer les 1500 employés de La Seyne et Menpenti bien qu’à cette époque l’embauche soit faite journellement pour la plupart des Seynois.
Pour honorer les commandes qui représentaient au moment de la liquidation 8 millions, une société provisoire en commandite est créée sous la raison sociale « Simons – Revenaz – Behic ». Approuvée par décret impérial le 21 mars 1855, elle est destinée à poursuivre les travaux avant la formation de la société définitive. Suivant acte passé à Marseille devant Maîtres Raymonard et Seux notaires, le 7 avril 1855, ils ont constitué entre eux une société anonyme sous le nom de
7 avril 1855 : CONSTITUTION D’UNE SOCIETE ANONYME SOUS LE NOM DE
SOCIETE NOUVELLE DES FORGES ET CHANTIERS DE LA MEDITERRANEE
…et en vertu du pouvoir qui leur est conféré de poursuivre l’homologation des statuts et consentir les changements qui peuvent être exigés. Ils ont déclaré arrêter ainsi les statuts sociaux : cette société a pour objet l’exploitation des immeubles, établissements, usines, chantiers et ateliers appartenant à l’ancienne société des Forges et Chantiers de la Méditerranée, faisant l’objet de la société en nom collectif et en commandite formé par acte du 7 avril 1855 chez Raymonard et Seux à Marseille sous la raison sociale Simons – Revenaz – Behic et Cie et tous les autres établissements à acquérir sur les bords de la Méditerranée.
Le siège de la société est établi à Paris, la durée de la société est de 30 années »
(Serge Razzanti, Cahier du patrimoine ouest varois n°14, 2012).
En 1855, la « Société nouvelle des Forges et Chantiers de la Méditerranée (FCM)« , est formée à Paris sous l’impulsion d’Armand Behic, haut fonctionnaire des finances et du Ministère de la Marine et Président des Messageries Maritimes. Il dirigera les FCM pendant 35 ans. Les FCM conquièrent à cette époque une renommée mondiale pour la qualité, la modernité, et les performances de leurs bâtiments, aisni que pour la diversification de leurs travaux et l’adaptation de leurs personnels aix différents types de construction*.
*-1857 – 6 avril : LES FINANCIERS CONTRÔLENT LES CHANTIERS DE LA SEYNE – En cinq ans, de 1851 à 1856, les Messageries Impériales ont mis la main sur les deux plus grands chantiers de la Méditerranée. Les financiers ont récupéré le contrôle sur les techniciens de génie, incapables de concilier les compétences techniques et le savoir faire du chef d’entreprise. La nouvelle société procède, le 6 avril 1857, à une nouvelle augmentation de capital. (éphémérides Henri Ribot)
La surface des chantiers passe de 4 à 13 hectares. Les quais sont développés, le port et la darse d’armement approfondis à partir de 1860. Un atelier de blindage est développé ainsi qu’un atelier de 227 mètres de long en bordure de la place de la Lune.
En 1863, les chantiers sont dotés d’un ponton mâture de 50 tonnes. Les cales en bois d’origine sont remplacées dix ans plus tard par des cales en maçonnerie, dont l’une longue de 200 mètres, dite grande forme, nécessaire pour les grands paquebots.
En 1872, les Forges sont assez puissantes pour acquérir les très importants Chantiers du Havre. En 1913, elles comprennent quatre sites (La Seyne, Le Havre, Granville et Marseille) et occupent en tout 45 ha dont 22 à La Seyne.
Entre 1880 et 1890 sont créés à l’est un parc à tôles ainsi que l’atelier des forges et cornières, les ateliers de scierie, de menuiserie, de salle à tracer, de poinçonnage, le pavillon des machines. Les engins de levage sont complétés par un ponton mâture de 80 tonnes. Les trois principales cales de construction sont prolongées par des avant-cales.
*1884, les chantiers seynois de la « Société Nouvelle des Forges et Chantiers de la Méditerranée » sont les plus importants de France, par leur surface, (14,6 ha), la longueur de leurs quais, près d’1 km. Ils possèdent tous les équipements pour la construction et l’armement complet des navires à coques de fer ou d’acier. « L’établissement est doté de moyens d’action puissants. » Les Chantiers seynois font prévaloir à ce moment, la construction en acier. Il dispose de 10 cales de construction dont la taille permet aux FCM de construire les plus grands bateaux de l’époque. Ces plus grands bateaux sont les paquebots et les cargos transocéaniques qui assurent les liaisons entre l’Europe et le reste du monde. C’est le Bourgogne de 155 m et de 8000 CV pour la Compagnie Générale Transatlantique. Ces navires initient les transports de masse à l’échelle planétaire, de passagers et de marchandises, et ils jouent un rôle comparable à celui des avions dans la 2° moitié du XX° siècle.
*1884 toujours, les chantiers ont aussi en cours la construction du cuirassé « le Marceau« , mais la construction en est ralentie par les modifications imposées par la Marine nationale. Le projet doit intégrer des innovations qui tardent à être validées. Un ferry-boat est aussi construit en 1884.
*Le Chantier est cette année-là sous l’autorité de l’Ingénieur Chef Lagane assisté de 5 autres ingénieurs. Le rapport nous signale aussi que sur les 2308 hommes, les ouvriers stables sont peu nombreux. La plus grande partie de la main d’œuvre est italienne, peu exigeante, utilisée de manière « flexible » selon les besoins, ce qui assure aux Chantiers seynois l’avantage d’avoir la main d’œuvre la moins coûteuse des Chantiers inspectés cette année-là.
*Les Chantiers se sont développés grâce aux commandes de la Marine Nationale, sous l’œil vigilant de l’Etat qui mettait en concurrence les divers chantiers de l’époque. Dans cette compétition, les chantiers seynois avaient la première place.
https://youtube.com/clip/UgkxrzeUv1ldXjkxSjXhjWAm8nq2J42DP8Sk*
« Dérogeant à la diagonale, Lumière fait ici front. Une première profondeur avec une rangée de spectateurs, une seconde qui est le bassin, le bateau, puis une troisième qui reflète la première au loin, d’autres spectateurs. Le plan est lancé avec la proue du navire déjà glissant et fermant la profondeur du champ et la hauteur du cadre. Mouvements de foule. Bris de cordes et de chaînes. Sans doute un bruit violent, un peu effrayant. Mais le navire continue son baptême. Vitesse du passage de la coque, qui rouvre en fin de plan la perspective, le lointain et les spectateurs en miroir ». (https://www.senscritique.com/)
Louis Lumière a annoté les vues qu’il s’attribuait dont celle-ci.- Le nom du navire est la Persévérance, le 3e du nom. Opérateur:[Louis Lumière] Date : 21 mars 1896 Lieu : France, La Seyne-sur-Mer, chantier naval de la Société des Forges et chantiers de la Méditerranée Projections : Programmée le 18 avril 1896 à Lyon (Lyon) sous le titre Lancement d’un navire (Le Progrès, 18 avril 1896). Eléments filmiques:négatif Lumière – 2 copies Lumière.
En 1906, le gouvernement met à l’étude un programme de constructions d’unités lourdes pour la Marine de guerre : des cuirassés actionnés par des turbines à vapeur du type Parsons. De nouveaux ateliers de tôlerie, de turbine et une station électrique sont construits et un nouveau ponton mâture de 170 tonnes est mis en service.
L’incendie de 1906
Au début du 20e siècle, une voie ferrée est détachée depuis la gare de la Seyne, pouvant desservir la Seyne et ses chantiers en passant par Brégaillon. Pour acheminer les fournitures en tous genres depuis la gare de La Seyne vers les chantiers navals, la construction du pont métallique ferroviaire levant, dit pont des chantiers* (référence PA00081737), est décidée en 1913 et commandée à la société Daydé, puis mise en service en 1917.
Au début du 20e siècle la surface totale des ateliers de la Seyne s’élève à 22 ha. En 1910 la cale la plus importante est élargie de 16 m pour accueillir des unités toujours plus grandes. Pendant la guerre de 1914-1918, les FCM demeurent l’un des plus grands chantiers de France. Un prototype de cuirassé terrestre est mis au point durant cette période. Entre 1925 et 1928 les effectifs d’employés aux chantiers baissent en raison de la modernisation des équipements.
Des grands travaux aboutissent en 1927 à l’installation de deux énormes caissons pour obtenir le plus grand bassin du monde.
Durant la seconde guerre mondiale, les chantiers construisent des chars légers. Le 29 avril 1944*, les bombardements touchent la ville et les chantiers. Le 17 août 1944*, près de 200 mines réparties dans les chantiers et le port explosent, 90% des chantiers sont détruits. La société des FCM décide de reconstruire une entreprise modernisée et plus performante. Deux ans après la destruction, la presque totalité des toitures est réparée et la superficie des chantiers a encore augmenté. Sur une longueur de 800 m, les quais sont pourvus de voies ferrées pour les grues Titan. Les trois grandes cales situées à l’est de la darse d’armement sont pourvues d’avant-cales et des navires de 220 m de long peuvent alors être construits à la Seyne. Dans cette période, beaucoup de cargos sont construits.
Après les deux conflits mondiaux, l’activité reprend grâce à la politique de recapitalisation de l’entreprise alliée à l’action des personnels engagés dans la « bataille de la production », initiée par le Parti communiste et la CGT.
L’année 1965 est marquée par un déficit record et l’entreprise perd plus de 500 salariés employés en régie. 1966 est une nouvelle année décisive. Le 3 février, le président directeur général des FCM et le directeur général adjoint des chantiers sont démis de leurs fonctions. Le 1er juillet, les FCM disparaissent pour laisser place à une nouvelle société, les Constructions Navales et Industrielles de la Méditerranée (CNIM), dirigée par le groupe Herlicq, un groupe franco-belge aux multiples ramifications. Ce dernier bénéficie alors d’une aide de l’État en contrepartie de la garantie de l’emploi sur deux ans. L’arrivée des CNIM ouvre de nouvelles années d’activité soutenue.
Les chantiers prennent alors le nom de Constructions Navales et Industrielles de la Méditerranée (CNIM), dirigées par le groupe Herlicq, un groupe franco-belge aux multiples ramifications, qui entreprend des efforts de reconversion dans diverses activités «terrestres».. En 1973, les chantiers de La Seyne-sur-Mer employaient plus de 5 000 personnes, mais à partir de 1975, la situation se dégrade, conséquence des deux chocs pétroliers et de la montée de la concurrence japonaise et américaine.
… La direction prend alors une série de mesures pour faire face au marasme qui s’annonce. Les travaux en sous-traitance sont rapatriés dans l’entreprise. L’embauche est stoppée et les effectifs sont réduits par le départ en retraite anticipée des salariés de plus de 56 ans et 8 mois. En décembre 1982, le site de La Seyne est réuni avec celui de Dunkerque et de La Ciotat dans la NORMED. La direction d’Herlicq décide alors de séparer le secteur industriel du secteur naval.
En décembre 1982, le site de La Seyne est réuni avec celui de Dunkerque et de La Ciotat dans la NORMED (chantiers du Nord et de la Méditerranée.).
Le site se transforme et les FCM connaissent une longue période de prospérité jusqu’à leur liquidation en 1986.
… les nouvelles directives européennes, les surcapacités de production et la décision du gouvernement français de couper les aides en 1986 conduisent la NORMED à déposer le bilan et les chantiers cessent toute activité en 1987. Une importante crise sociale touche alors les villes de La Seyne et de La Ciotat…«
Sources :
http://archives-films-paca.net/memoire-chantiers-navals/interviews-et-ressources/histoire-des-chantiers-navals-en-provence/item/1047-histoire-des-chantiers-navals-de-la-seyne-sur-mer.html
21 old films from 1895 to 1902 colorized and upscaled in 60 fps, with sound (Films Lumière)
https://www.senscritique.com/
Archives Jacques Besson
Manuscrit Honoré Besson
Plan Archives seynoises
Documents personnels
Le PETIT VAR
Serge Razzanti, Cahier du patrimoine ouest varois n°14, 2012
La République du Var
Wikipédia
*Les chantiers navals de La Seyne, une entreprise pionnière de la Révolution industrielle C. Gervois , professeur agrégé d’Histoire-Géographie, avril 2001
La construction navale en Provence : essor et déclin d’une industrie par Jean Domenichino et Stéphane Kronenberger
www.laseyneen1900.fr : La fabuleuse histoire des Chantiers Navals de La Seyne sur mer de 1853 à 1942, du Languedoc au Kairouan...(60 sujets traités, 39 diaporamas)
Bonjour.
Je suis à la recherche de toute information, photos, documents, contacts, associations pouvant me renseigner sur l’usine des Forges de la Capelette après son rachat en 1866 par les Frères Marrel de Rive-de-Gier (42800)
A froid cela ne me dit rien mais si je tombe dessus je vous en ferai retour. Cordialement
Bonjour,
Pouvez-vous m’indiquer s’il existe des archives consultables du personnel (ingénieurs) du FCM ?
Je suis à la chercher d’un ingénieur qui a travaillé au FCM de 1890 à 1900.
En vous remerciant par avance,
Bien cordialement,
FBB
Bonjour, je pense que les archives municipales doivent avoir ces registres. https://www.archives.la-seyne.fr/informations-pratiques/nous-contacter
Cordialement.