A propos de l’origine du nom de La Seyne , dont l’hypothèse communément admise est celle qui fait référence à cette plante marécageuse, la siagne, dans Lou Tresor dóu Felibrige, Frédéric Mistral suggère (1878) que ce serait la sèino, la sègno, ce grand filet de pêche (et la technique de pêche qui l’utilise, l’eissaugo, la savego) qui aurait donné son nom à cette région nouvellement conquise sur les terres orientales de Six-Fours, l’habitant logiquement, se nommant seinen,seinenco…
On y lit aussi ce curieux sobriquet dont les seynois étaient alors affublés, lei brulo bano, les brûleurs de corne, dont une explication est donnée chez Autran : « dans les premières époques de la construction navale, où les chevaux qui tiraient les charrettes de bois de charpente devaient être ferrés régulièrement. D’où une odeur fréquente de corne brûlée ».
Dans le dicod’Òc on retrouve l’expression Brulo-Baxo pour désigner les seynois…Sagena en latin , σ α γ η ́ ν η « seine, grand filet de pêcheur en grec ancien, senne ou seine en français… ( l’origine du mot issaugue qui serait formée de deux mots est moins certaine)…
« Je me souviens avec attendrissement d’une belle soirée d’été où, après un fin dîner, nous regardions tous deux sur cette plage riante les pescadours bronzés qui tiraient gaiement la seine. Dans l’eau transparente, sous les mailles brunes du filet, frémissaient des milliers d’anchois, papillotage irisé qui amusait les yeux… »
Anonyme : À Toulon Revue des Deux Mondes
https://youtu.be/DHUaDp5rGXQ
( La pêche à la senne à La Seyne )
« Tamaris ?… lieu ! Tamaris, c’est joli, certainement, c’est coquet, léché même. Trop, justement.
Le rustique Tamaris de George Sand est devenu une station à la mode. Et la foule, tous les dimanches, été comme hiver, y admire avec son heureuse candeur les perrons fastueux des hôtels, les élégances byzantines — ou turques, on ne sait pas bien — des villas meublées qui s’enorgueillissent de leurs rocailles artificielles et de leur inévitable palmier.
Bien entendu, casino à Tamaris*, casino aux Sablettes*, petits chevaux, salle de spectacle, plage de sable fin : « la plus belle du Sud-Est… » Et quoi encore ?…
Notre petit vapeur traverse les lignes de l’escadre, le cap sur la bonne vieille tour de Balaguier, toute ronde et toute vide, et qui a l’air d’une énorme lanterne. Nous laissons à notre droite, au fond de la rade, la Seyne et ses chantiers ; plus près de nous, l’Eguillette, les dépôts de fulmi-coton et l’ancien fort, le « petit Gibraltar, » que Bonaparte enleva de haute lutte aux Anglais.
La petite anse entre l’Eguillette et Balaguier n’est pas encore trop envahie par les villas modernes. Le restaurant du Père Louis* est toujours là, modeste, confortable et fleuri, habile aux fritures improvisées et à la bouillabaisse délectable.
Je me souviens avec attendrissement d’une belle soirée d’été où, après un fin dîner, nous regardions tous deux sur cette plage riante les pescadours bronzés qui tiraient gaiement la seine.
Dans l’eau transparente, sous les mailles brunes du filet, frémissaient des milliers d’anchois, papillotage irisé qui amusait les yeux… »
Anonyme À Toulon : Revue des Deux Mondes, 5e période, tome 21, 1904 (pp. 593-635).
Dans ce paysage mi-urbain mi-naturel, ciel et mer ont une place de choix. Courdouan décrit avec réalisme les mœurs au XIXe siècle ou pêcheurs et bourgeoises se côtoient avec humilité. On reconnaît le fort Balaguier et le symbolique Palmier, reflet de l’orientalisme. Lorsqu’il peint cette toile, l’impressionnisme se joue à Paris. Le salon officiel de Paris, depuis 10 ans, refuse les toiles d’artistes impressionnistes : Cézanne, Renoir, Monet… Courdouan ignore cette révolution picturale, croit à la beauté par le souci de l’exécution, la primauté du dessin, l’équilibre de la composition. Cette toile en est l’illustration en affirmant l’identité régionale face à la centralisation et à l’innovation parisienne.
Texte Musée du Patrimoine Ollioules
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