La fin tragique de Michel Tortel

Le contexte :

En 1646, la Ligurie est principalement sous l’autorité de la République de Gênes sous l’influence de l’Empire espagnol, qui exerçe toujours une tutelle politique et économique sur Gênes.

La côte ligure est encore menacée par les pirates barbaresques, ces corsaires musulmans qui opèrent depuis l’Afrique du Nord.

La Ligurie, (notamment via Vintimille), entretient des liens économiques et culturels avec la  Provence dont elle est frontalière et Ramatuelle, située près de Saint-Tropez (ancien site sarrasin de Frassineto), est sous l’influence de l’abbaye de Saint-Victor de Marseille, qui possède des droits sur des terres provençales et ligures. 

Michel Tortel, en tant que marchand maritime de Sex Furni (Six-Fours car La Seyne n’obtiendra son indépendance qu’une dizaine d’années plus tard) opère dans ce contexte d’échanges transfrontaliers, ce qui pourrait expliquer son titre de « sieur de Ramatuelle », probablement lié à des possessions ou à une influence économique dans la région (voir infra). L’abbaye de Saint-Victor, avec laquelle Tortel est en relation, joue un rôle clé dans la gestion des terres entre la Provence et la Ligurie, renforçant les liens entre ces régions.

L’évènement :

  • D’après les annales d’Aix :

Le Sieur de Ramatuelle est décédé en 1646 si l’on en croit Théotime de Saint-Just, Père, lecteur émérite en théologie qui évoque la fin tragique du fondateur du couvent :  

Le 18 avril 1646, Michel Tortel se trouvait avec son navire au large de la côte génoise devant Finale Ligure, entre Albenga et Savone. Cette place appartenait au roi d’Espagne, contre qui la France était en guerre (guerre de 30 ans). Son navire, chargé de riz et autres marchandises, manœuvrant lourdement, fut rattrapé par deux frégates espagnoles; luttant courageusement pour défendre sa liberté et ses biens, Tortel fut frappé de + de 25 coups d’épée et de dague. Transporté à terre encore vivant, il demanda des Capucins pour le préparer à la mort. Les religieux du couvent de Finale accoururent aussitôt, lui administrèrent les sacrements et l’assistèrent jusqu’à la fin qui n’eut lieu que six heures après. Il fut enterré devant la Chapelle des Capucins de Finale.

Annales d’Aix Les Capucins de l’ancienne province de Lyon (1575-1660) T1.

  • La confirmation vient des archives de Ligurie :

Le texte manuscrit est en latin ecclésiastique, transmis par Antonio Narice (chercheur) à Simonetta Ottani des Archives diocésaines de Savone via l’archiviste de la commune de Finale Ligure Grazia Mendaro.

Anno Dei, 1646 die vero, 29 mensis Aprilis

Capitaneus Michael Torteo de loco Sei Forni, natus anno quinquaginta circiter in communione sanctae matris ecclesiae animam Deo reddidit, ejus corpus sepultum fuit in platea ecclesiae Sancti Francisci Pat. Cappuccinorum Finariae, confessus est Rev. Presb. Niccolao Arduino Cappellano et ab eodem sacri olei unctione fuit roboratus. 

L’an de Dieu 1646, le 29 avril,

Le capitaine Michel Tortel, du lieu de Sei Forni (Sex Furni), né il y a environ cinquante ans, en communion avec la sainte mère Église, a rendu son âme à Dieu. Son corps a été enseveli sur la place de l’église Saint-François des Pères Capucins de Finale. Il s’est confessé au révérend prêtre Niccolao Arduino, aumônier (et a été fortifié par lui) qui lui a administré (avec) l’extrême-onction.

Ce certificat confirme donc les détails de la mort de Michel Tortel, survenue le 29 avril 1646, après l’attaque du 18 avril. Il précise son lien avec Six-Fours et sa sépulture à Finale Ligure, devant l’église des Capucins.

Aparté sur « Seigneur de Ramatuelle » :


La seigneurie de Ramatuelle : Pour assurer l’exercice de la religion la cité fit appel aux moines de l’abbaye de St Victor-les-Marseille auxquels on fit don de vignobles et d’une métairie (1056). Plusieurs familles de châtelains se succédèrent ensuite jusqu’à la Révolution : les Saumada, de Castellane, de Villeneuve, de Cossa et d’Audibert (mais pas de Tortel ni même dans les unions maritales avant 1689).

ramatuelle-tourisme.com


« Le lien entre Michel Tortel et la seigneurie de Ramatuelle semble être davantage une association symbolique ou économique qu’une véritable possession de la seigneurie. Tortel, en tant que riche marchand et notable, a pu être appelé « sieur de Ramatuelle » en raison de propriétés ou d’une influence dans le village, mais il n’était probablement pas le seigneur féodal au sens strict. La seigneurie de Ramatuelle est plus directement liée à la famille Audibert à partir de la fin du XVIIe siècle »… 

« Ramatuelle et ses terres étaient sous l’influence de l’abbaye de Saint-Victor de Marseille, qui possédait de vastes domaines dans la région. Les seigneurs locaux, comme les Audibert, collaboraient souvent avec cette autorité ecclésiastique. C’est en 1689 que les Audibert originaires d’Auriol sont devenus Sieurs de Ramatuelle quand Henry d’Audibert achète la terre de Ramatuelle, (avec le titre de Sieur de Ramatuelle attaché au propriétaire) peut-être au dernier Tortel Sieur de Ramatuelle, qui lui aurait vendu sa terre. Son fils François d’Audibert de Ramatuelle (1682 – 1773), sieur de Ramatuelle, fut le propriétaire de Castel Gombert au début du XVIIIème siècle ».

GROK 3

En 1657

Ce n’est qu’en 1657 que La Seyne accède au statut de commune indépendante, elle compte alors un millier d’habitants dont un tiers vivant du commerce maritime », Mazarin étant l’abbé de St Victor (de 1653 à 1661).

En 1658

1er février 1658 : Le Roi Louis XIV, par acte royal accorde son indépendance à La Seyne, citant son « très cher et très aimé Cousin et Cardinal Mazarin, Pair de France, Duc de Mayenne, abbé de l’Abbaye de Saint-Victor-les-Marseille.

Robert de Frangipani, bon ouvrier de l’œuvre, ne verra pas l’heureux avènement car, en 1657, le seigneur spirituel et temporel de Six-Fours-La Seyne est Mazarin principal ministre d’état de Louis XIII puis de Louis XIV à la suite de Richelieu et successeur en tant qu’abbé de St Victor (de 1653 à 1661) au cardinal frère de Richelieu.

Mazarin était très favorable à la création de cette commune à titre personnel, car avec deux communautés à la place d’une, il allait percevoir des rentes et des cens supplémentaires.

En 1669

LA VIE D’UN MONASTERE (Annales de Marseille citées par Pierre Dubois dans « Les Capucins varois à La Seyne sur Mer »)

L’Evescat¨ : En 1656, Louis Daniel Seigneur des terres de Lérys, conseiller et secrétaire du roi, gouverneur de La Seyne sous Louis XIV, y fonda sous le vocable de « Saint-Louis« , une chapelle auprès d’un ancien prieuré. 

En 1694 les évêques de Toulon achetent la chapelle, agrandissent les établissements et en font un véritable domaine. Ils viendront s’y reposer. Vendu comme bien national sous la révolution le domaine St Louis connaitra plusieurs propriétaires successifs dont les Pézenas de Bernardy (c’est pourquoi Rose repose au cimetière de La Seyne*)

Sources

Henri Ribot :

  • Frangipani, Mazarin, leur influence sur la création de La Seyne (Regards sur l’histoire de La Seyne-sur-Mer, Six-Fours et Saint-Mandrier n°16)
  • ephemeridesribot.com

Le manuscrit de Maître Jean Denans 1713

laseyne.info/pdf/Caleta_Tortel

JC Autran :

  • jcautran.free.fr/oeuvres/tome8/origine_quartiers
  • jcautran.free.fr/rues/lexique_rues

« Quelques Seynois méconnus » Lucien PROVENÇAL Le filet du pêcheur N° 127

HISTOIRE DE LA COMMUNE DE LA SEYNE-SUR-MER Louis Baudoin

Annales de Marseille citées par Pierre Dubois dans « Les Capucins varois à La Seyne sur Mer ») LA VIE D’UN MONASTERE

Annales d’Aix Les Capucins de l’ancienne province de Lyon (1575-1660) T1.

Généanet + Filae

GROK 3

https://www.ramatuelle-tourisme.com/wp-content/uploads/2020/06/Historique-Fran%C3%A7ais.pdf

Antonio Narice (chercheur),Simonetta Ottani des Archives diocésaines de Savone, Grazia Mendaro archiviste de la commune de Finale Ligure

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